mercredi 29 juin 2011

Les vidéos de Hélène sur Dailymotion

Vivre pauvrement... une volonté écolo... et parfois une nécessité

Une vidéo qui montre à quel point la justice parfois est vitale pour le citoyen (et surtout la citoyenne)

Cliquer sur l'image pour la vidéo : les mésaventures burlesques, entre Giono et Kafka, d'une femme retournée dans son village natal tenu par quelques oligarques (hommes), leurs épigones (femmes, parfois) et leurs séides. 

vendredi 3 juin 2011

La justice expliquée aux enfants

 ou le Droit de travers...

Une belle chose, la Justice, garante et protectrice des opprimés contre des filous ou des criminels : le dernier recours lorsque tout a échoué. Des magistrats parfois courageux, sans parler spécifiquement d'Eva, (lien), des greffiers idem, cela varie certes mais bon... Mais un dysfonctionnement ou plutôt un fonctionnement sous forme de film à suspense, de labyrinthe éprouvant, palliable certes mais à quel prix : la justice  ou pourquoi faire simple si on peut faire compliqué?

Exemples. Soit une petite ville de province aimable et ensoleillée où tout le monde se connaît, se sourit, différemment selon les  castes et parfois médit. Gentiment, on ne jase que sur la couleur d'un costume, les vrais secrets sont tus. Soit des aventures burlesques qui vous tombent dessus, fréquent si vous êtes un out sider ou parti depuis longtemps et revenu de "peu", surtout si vous êtes femme et n'avez pas d'homme attitré sur place et en place... (note : les gens simples vous accueillent souvent comme si vous n'étiez jamais partie et ce qui va suivre ne concerne qu'un très petit nombre.) Au hasard : un Important -à la mesure du village- démolit par inadvertance votre maison, vous l'assignez, gagnez, il la reconstruit ouf… et peu après vous être saisi sur votre pré retraite de 900 € pour une facture d'eau de 4000 € faite précédemment dans.. la maison justement qu'il a dû reconstruire ensuite ! Et que vous n'avez jamais habitée (forcément, étant donné son état, qui remonte à loin).

S'ajoutent alors quelques ennuis mineurs en chaîne issus du hasard bien sûr mais aussi de la nécessité, exemple un voisin vous assigne en référé (!) pour une fresque qui lui déplaît etc... J'oubliais : celui qui avait démoli votre maison est maire, pardon, fils mais enfin... et le voisin, un ami. Bref tout baigne.

Cela donne alors un autre procès pour ces 4000 €, en tout le 3ème : pour qui n'avait jamais esté jusqu'alors, c'est beaucoup.. procès qui, contrairement au poncif, vaut tout de même mieux que des négociations usantes et vaines car dans cette ville le temps ne se mesure pas comme ailleurs ("bientôt on va réparer les dégâts qu'on vous a causé" -la maison qui se démolit- peut signifier "dans 10 ans ou jamais"; "rendez-vous à 2 heures", à "3, 4"... ou rien.) Mais la montagne est belle...

Parlons maintenant technique, les trois procès confondus.

En vrac :
– vous êtes convoqué le vendredi pour le jeudi précédent, l'huissier de votre voisin ayant péché (?) sans doute. "En votre absence -dit la lettre menaçante découverte à 6 h le soir en rentrant -vous vous exposez à être jugé sur les seuls arguments de.." Angoisse. Le lundi, vous apprenez que la juge a reporté, ouf 

– l'avocat sympa que vous avez diligenté en urgence, votre amie avocate étant en vacances au Maroc, se trouve être l'employé du frère de votre partie adverse, triple zut, et de plus, à la veille du référé, il s'avère qu'il n'a pas lu le dossier, mais alors pas du tout, vous le virez (gentiment) mais vous l'avez déjà payé, quadruple zut. 

– vous courrez chez un autre qui condescend à vous recevoir au pied levé, ne vous écoute pas mais se fait tout de même payer d'avance (une partie) pour demander le report, auquel il ne se rend pas, envoyant un confrère qui n'est au courant de rien mais alors rien de rien, par exemple il ignore que vous avez été convoqué pour la précédente audience le lendemain.. pour le jour précédent et ne moufte pas lorsque l'avocat de votre partie adverse se moque de votre "versatilité", une grande changeuse d'avocat devant l'Eternel. Report accepté, ouf. 

– il vous convoque la veille de l’audience (il n'a pas pris vos appels durant tout le temps ni apparemment lu vos courriels) alléluia, mais c'est pour se faire payer. Vous n'avez cependant pas perdu votre temps : comme il était en retard, pendant ce temps, sa secrétaire vous a photocopié le dossier que vous n'aviez jamais eu car il n'avait jamais songé à vous le donner ni vous à l'exiger, forcément puisque vous ne l'avez pas vu. Vous sortez, vous attablez à une terrasse, lisez et là, en deux minutes, c'est l'illumination, un élément fondamental vous saute aux yeux. C'est gagné, vous foncez le lui signaler. Il vous reçoit très hard, "je n'ai pas que ça à faire" etc. Vous insistez tout de même, c'est pour demain matin et lui indiquez la page de l'élément qu'il devra plaider que vous cornez pour plus de sécurité, il consent, .. en vous escortant à la porte et vous poussant légèrement pour que vous dégagiez plus vite.

– Mais le lendemain au tribunal, il n'est pas là. Angoisse. Le voilà enfin qui surgit avec une heure de retard, les yeux encore rouges, il ne sait plus où il a mis sa sacoche, vous la lui indiquez. Audience. Plaidoirie courtissime et il oublie l'élément fondamental. Vous le rajoutez oralement. Mais en plein milieu d'un discours, il glisse en aparté quelque chose à son confrère que vous ne comprenez pas, vous n'osez pas couper. C'est la juge qui l’interrompt et vous questionne : en fait, il s'est tout simplement engagé à votre place à ce que vous payiez à demi les frais d'une expertise censée être dirigée contre vous. Vous refusez, tout baigne, les points essentiels sont gagnés, le reste n'est que détail…

– L'expert à 3 000 € (?) au bout de 2 mois (?) pond un pré rapport qui vous donne raison. Ouf. Un second, idem mais trois mois après. Ouf. Puis vient un troisième deux mois après encore que vous ne lisez même pas... identique… mais dans lequel il a ajouté juste une petite phrase sournoise à la fin remettant tout en question. Inutilisable et par vous et par votre adverse. Qui a donc raqué 3000 € (?) pour un texte à mettre à la corbeille. Au moins n'est-ce pas vous qui les avez déboursés.

Ils réattaquent sur un autre point, toujours burlesque, on fait avec ce que l’on a. Rien de grave mais vous devez encore vous redéfendre et pour cela, même si un avocat n'est pas nécessaire, vous y avez laissé déjà 1500 € deux fois de suite pour RIEN OU PLUTOT POUR DU PIRE, vous devez rédiger l'assignation (la lettre de convocation à la partie adverse) et passer par huissier. Qu'à cela ne tienne, le net n'est pas fait pour les chiens et, aidée par les greffières du tribunal, vous pondez un document à peu près convenable.

– Mais d'huissier pour l'envoyer, vous ne trouvez pas. Rien, zéro. L'un est en vacances, l'autre absent, la troisième a déjà été celle de votre partie adverse, la quatrième aussi, ils ont pas mal écumé, des cabinets de groupe avec numéros surfacturés vous renvoient à un répondeur lequel vous annonce à 10 h qu'il ne sera répondu aux appels que de 9 heures à midi, le clou étant un autre qui vous renvoie à un portable au bout duquel se trouve un clerc gentil mais perdu qui vous fait gaspiller temps et argent. Certains vous disent carrément que dans la mesure où vous n'avez pas d'avocat, ils ne peuvent "vous" prendre. Jour J moins 2, vous voilà quasiment forclos. Angoisse. Vous avez TOUT écumé ou presque.

– Jusqu'à ce que, Dieu est grand, l'un, pas tout près mais baste, accepte enfin. Mais il oublie de l'enrôler c’est à dire de l'apporter au tribunal si bien que l'affaire, le lendemain est reportée. Il faudra une autre assignation... qu'il prétend vous faire payer plein pot (100€). Vous marchandez, il consent à vous en enlever 60.

– Mais lorsque vous le recontactez, il vous éconduit; il doit justement partir pour trois jours. A nouveau, c'est le parcours du combattant pour en trouver un autre et là ça devient chaud car, comptant sur lui, vous avez perdu un temps précieux. Comme pour la première fois, personne ne veut de votre affaire ("sans avocat, comprenez-vous" etc)... En désespoir de cause, sur les conseils d'un huissier sympa mais non compétent territorialement, vous appelez le Président de la chambre des huissiers où on vous raccroche d'abord au nez, une erreur, soit (?) vous rappelez et annoncez à la secrétaire raccrocheuse que vous allez devoir saisir le procureur de la carence des TOUS les huissiers territorialement compétents. Et là, miracle, c'est le sésame comme dans les films : elle vous donne un bon numéro, vous vous expliquez et un quart d'heure après l'assignation est délivrée.  Ouf.


Ce coup-ci, c'est 60 €, mystère de la tarification des "exploits", car lorsqu'un huissier se déplace, c'est un exploit, plus ou moins important si l'on en juge par le coût, sans doute relié à la longueur de ses jambes ou à sa vélocité.

– Seulement il vous faut l'apporter vous-même au greffe. Rien de grave, un coup de voiture (40 km aller retour) et voilà. Mais arrivé au tribunal, il est 15 heures, donc bien loin des 17 fatidiques, un planton rien moins qu'aimable vous dit "c'est fermé". L'affaire ne sera donc pas "enrôlée" pour la deuxième fois ? Un troisième "exploit" à payer? Vous hésitez entre le suicide et le meurtre lorsqu'une aimable greffière vous crie (car le costaud barre) de loin derrière sa vitre "c'est pour quoi?"... "Un référé"... "Pour quand?"... "Demain"... Elle appelle sa collègue, débranche le Cerbère et vous pouvez enfin passer, donner votre dossier. Ouf.

Et voilà. Une question simple: les avocats semblent (je dis bien semblent) comme on dit "s'arranger" entre eux, ce qui leur économise (parfois) de lire les dossiers voire d'agir : ainsi un tout jeune, désireux de se placer, durant une audience n'ouvrit pas la bouche devant sa consœur ultra agressive ; les huissiers "semblent" je dis bien semblent, vous pousser à l'épaule vers les avocats... lesquels vous poussent également vers des constats et des expertises, ça va avec, quant aux experts, certains mettent six mois, après une visite rapide sans mètre ni viseur pour rédiger un rapport qui ne veut strictement rien dire sauf son prix, 3000 €... (?)

Et parfois, malgré tout, justice est rendue et ça, c'est un exploit en effet. Mais quel quidam sans instruction, s'il n'a pas des moyens importants, les nerfs solides ce qui en général va avec  et vice versa peut y avoir accès ? Compliquée intentionnellement, faite pour ceux qui peuvent s'adapter à ses arcanes : quelles que soient l'éthique et la conscience professionnelle des magistrats, elle favorise de fait les nantis et décourage les autres : ainsi dans certaines régions et sans doute partout des margoulins règnent-ils, rackettent, et leurs victimes se laissent-elles écraser sans mot dire. Le pot de terre contre le pot de fer entend-on souvent. Mais il arrive tout de même que le pot de terre gagne.

Le lendemain, à 9 heures pétantes, vous croisez sur le parvis l'avocat de la partie adverse souriant et élégant qui vous annonce que l'affaire sera renvoyée car il n'a pas pu préparer le dossier. C'est la procédure et ici c’est normal. Lui s'en va aussitôt : pas vous qui devez attendre l'appel des cas jusqu'au vôtre. Une heure ou deux seulement, rien de grave et vous n'aurez pas à repayer une troisième fois une assignation. Ouf. Suite au prochain épisode. (Finalement, votre partie adverse mal barré se retirera d'elle même, c'était juste pour rigoler quoi... Vous auriez pu les attaquer pour procédure abusive mais vous n'en pouvez plus et laissez courir.)

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Mais ce procès n'étant qu'amuse-gueule connexe et faena de picadors pour fatiguer la bête, le prochain set, pour la facture de 4000 € cette fois, le "vrai", sera plus dur.

D'abord il y a le premier report. "Ils" (votre adverse, en le cas, la Mairie) n'ont pas pensé à prendre un avocat. Depuis trois mois tout de même, quels étourdis mais bon. Il leur faut le temps de le trouver. Soit c'est la loi. La seconde fois sera dans deux mois... que vous attendez comme le jugement dernier lorsqu'on est sûr de ne pas avoir péché... Entre temps il s'est passé un an et votre compte est prélevé de la quasi-totalité… et vous crevez un peu de faim mais c'est un détail car vous n'arrivez de toutes manières pas à manger.


 Au tribunal d'instance, on a donc le droit de ne pas être représenté par un avocat même comme "demandeur" c'est-à-dire initiateur, si le litige n'excède pas 4000 €. Et c’est souvent mieux notamment en province où (voir lien)... mais pas toujours facile, les formules de requête doivent être adéquates etc. Les greffiers le pallient gratuitement il faut les saluer, si j’avais dû les payer au tarif où j’ai payé mes trois avocats:

– le jeune mutique terrorisé par sa consœur (je m’en suis tirée sans lui) qui m’a pris 700 € pour jouer les potiches

– l’ex employeur du frère de ma partie adverse qui n’avait pas lu le dossier

– le mal réveillé qui ne l’avait pas davantage lu mais s’était engagé sans me le dire à ce que je paie 1500 € l’expertise de mes contradicteurs (qui du reste fut à mettre à la corbeille)..
… je leur devrais des millions.

Voilà donc enfin arrivé au jour J. Premier épisode : une salle surchauffée où les gens attendent, certains ne peuvent pas s'asseoir (lien), le ballet des hommes en toge qui bavardent sans trop se gêner, du coup certains quidams n'entendent pas l'appel de leur nom "mais non je ne suis pas absent"... "vous n'avez pas répondu" etc. Et c'est la litanie infinie : affaire truc contre machin, report... affaire chose contre bidule, report... Les avocats s’avancent, parlent à mi voix au juge ou entre eux, ça défile. La magistrate a quelque chose comme 150 dossiers, elle doit choisir les plus urgents... Un sur dix ?

Votre partie adverse a bien sûr demandé le report... que la juge s'empresse d'accepter, c'est toujours ça gagné, on la comprend. Ca tombe dans deux mois et demi. Encore à attendre donc. Votre compte est donc toujours saisi pour une facture de 4000€ correspondant à une maison que tout le monde reconnaît que vous n'avez jamais habitée. Re arrive enfin le jour "J'" où justice va vous être rendue etc. Jour que vous attendez avec impatience depuis deux mois. – Non, un an.–

Notez que vous avez reçu les "conclusions" de votre partie adverse... la veille au soir, encore vous a-t-il fallu aller les chercher auprès de la police municipale... où, malchance, le policier municipal qui vous avait apporté la convoc était en congé l'après-midi et le seul qui se trouvait dans le bureau surchargé de paperasse savait pas où l'autre l'avait mise, finalement, il l'avait trouvée mais il avait fallu insister. Vous avez donc eu une nuit pour préparer vos "conclusions" c'est à dire vos réponses à l'avocat et vous n'avez évidemment pas dormi, le stress car ce n'est pas compliqué.

Chose faite, vous êtes donc au tribunal et attendez. Votre ex a pu venir en renfort de Paris. Ouf. C'est un autre juge et il a une centaine de dossiers lui aussi, une paille. Arrive votre tour. Et c'est... le fatidique "report".

La nuit blanche, les propos désobligeants tenus brièvement à votre encontre par l'avocat, le juge surchargé qui s'exclame qu' "il n'y a pas d'urgence" puisque vous êtes déjà "saisie" (votre compte est prélevé, ça oui) autrement dit, au point où vous en êtes, vous pouvez tenir encore deux mois de plus... ou DAVANTAGE... Rien ne va plus. Vous lui tendez la convocation de votre partie adverse datée et même horodatée de la veille à 5 h il s'étonne, trouve en effet la démarche inacceptable et contraint le jeune avocat à en convenir, ce que celui-ci fait au bout de trois fois avec une certaine mauvaise grâce, comme si on lui arrachait les... mettons oreilles.

Puis le juge lui demande aimablement si le report lui convient, il acquiesce mais souligne qu'il vient de loin et du coup le magistrat l'assure qu'il sera prévenu en cas d'impossibilité pour la prochaine fois afin qu'il ne se dérange pas pour rien.. au cas où l'affaire serait encore renvoyée en raison du trop grand nombre de cas. Sans un mot pour vous.

Et là, c'est le clash. (Il y en a de pires, lien.) Votre compte saisi, le fait d’être déjà venue deux fois (en fait dix ? tout compris avec le paseo burlesque*) et ce monsieur parce qu'avocat sera, lui, averti et non vous qui allez peut-être encore être éconduite... Quelque chose se noue ou plutôt se dénoue, vous vous emballez, soulignez la différence entre la manière dont est traité le justiciable et l'avocat c'est à dire le justiciable avec avocat et le justiciable sans avocat... que la justice n'en sort pas grandie etc... et à la réponse du juge surchargé : "Allez voir votre député, je ne peux faire mieux" vous rétorquez : "Allez voir votre syndicat". Ca s'emballe et vous sortez tout, l'attente, l'injustice, votre compte saisi, les reports successifs, là, de deux mois et encore rien n'est sûr, qui profitent aux mieux lotis ou aux filous et découragent les pauvres etc. 

Au stade où vous êtes, vous vous en fichez, tant pis si vous braquez celui qui détient peut-être votre sort entre ses mains, tant pis si vos propos dépassent votre pensée, ce n'est pas le cas, la locomotive est emballée et vous crachez tout, invoquant l'équité et la justice que vous cherchez en vain, tiens, il n'y a plus la Marianne avec sa balance au fait...
 
Et là, stupeur, c'est le juge qui s'explique (lien) : les restrictions effarantes de budget, on compte même le papier et les stylos, et de personnel, il a deux tribunaux en charge pour remplacer des absents c'est à dire qu'il doit effectuer sans moyens un travail de deux collègues déjà trop lourd pour un seul, (plus les trajets) il n'a par exemple pas pu passer un fax hyper urgent au tribunal de Mende... parce qu'on leur avait coupé le téléphone pour non paiement (!)... Les congés ne sont pas remplacés ou à demi ce qui signifie doublement de sa charge de travail (lien) etc.

Vous savez cela dans les grandes lignes mais ces détails vous échappent comme à tous, certains se suicident observez-vous (lien) et lui ajoute qu'il y en a encore eu un autre récemment, vous l'ignorez, apparemment, les suicides de juges ne font pas recette... Vous partez en sanglots, il se montre navré et aimable, ne supportant pas dit-il de voir une femme pleurer... et c'est vous alors qui lui répondez que ce n'est pas grave, moins dramatique que Fukushima en somme. Surréaliste. Un seul avocat (à votre connaissance) a protesté et a demandé à votre ex de vous entraîner dehors, les autres n'ont pas bronché mais il est vrai que le juge s'est in fine plus exprimé que vous. Je pleure encore en l'écrivant. Encore deux mois, deux mois... l'éternité moins un jour. A qui cela profite-t-il? A ceux qui vous pompent depuis deux ans, c'est toujours ça de gagné.

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*Car même pour ce procès bidon, il y avait eu un autre report précédent.. où une jeune juge, sympa, 24 ans à vue de nez... qui avait en charge 140 affaires.. pour un début de carrière, c'est un début de carrière, des gens venus de loin, 80 km dans un cas, qu’un monsieur âgé avait fait en car, il est là depuis le matin et restera jusqu'à 6 heures du soir, il n'y a que deux services/jour et il marche avec des cannes, des gens debout car il n'y a pas de place pour tous, qui toute l'après midi attendent, et la litanie: "affaire T contre M" l'un s'avance, discours entre la juge et parfois un avocat, inaudible. Report. Affaire C contre la société A, une flopée d'avocats, ça doit être du lourd, inaudible. Report... Des gens de plus en plus épuisés, en nage dans mon cas... sans bouger car on ne sait jamais si on va être élu ou non et ça va vite parfois.

Ce genre de dysfonctionnement voulu par le pouvoir exaspère à juste titre mais parfois à mauvais escient contre les juges et le personnel qui en sont les premières victimes et bénéficient aux favorisés et aux filous qui ont pu prendre un avocat (1000€?) ne se sont pas déplacés voire ont opté pour jouer la montre dans le cas de l’affaire d'escroquerie contre le vieux monsieur, d'ici trois mois, il n'aura peut-être plus la force de se traîner toute la journée en ville : l'injustice perdure ; même "réparée" ensuite, le dommage ainsi aggravé devient irrémédiable et les indemnités, s'il y en a, jamais à la hauteur de celui-ci.
 Que des juges consciencieux accablés par leur charge de travail se suicident (lien) n'a rien d'étonnant. Ne pas pouvoir correctement effectuer son travail est la pire des blessures et se voir tacler ensuite injustement enfonce encore plus dans le gouffre. C'est comme si on exigeait que vous couriez après qu'on vous ait entravé bras et jambes et qu'on vous fustigeait de ne pas avoir été aussi rapide que l'urgence l'imposait, le pire étant lorsque la volée de bois provient d'un public lui aussi victime et de bonne foi. Le "double lien" –un parent donne à un enfant deux ordres contradictoires du type "obéis-moi, désobéis !"– est une torture psychologique raffinée : il est toujours en faute quoiqu’il fasse. Le suicide est au bout, surtout si, dans le cas de ce jeune juge, on a tout sacrifié petit à petit sans même s'en rendre compte à son beruf, plus de famille, d'amis, d'enfants, des dossiers, des noms, des chiffres, des drames, des décisions à prendre toutes également urgentes, des questions qui taraudent ... et parfois une erreur.

Si j'étais un filou, je ne me gênerais pas pour arnaquer des vieux pas trop riches sans appui, sûre de ma quasi impunité. Que vont-ils faire si le broyeur que je leur ai vendu si cher et que je refuse de leur rembourser est interdit, dangereux et leur a explosé à la figure? Aller chercher un huissier? Soit. 100 €. Rédiger seul ? Il ne pourra pas. Cette ville bénéficie de greffiers particulièrement complaisants il est vrai mais ce n'est pas le cas partout. Venir à l'audience à supposer que vous ayiez été convié à temps n’est pas facile : le vieux monsieur lui aussi attend depuis 3 mois "son" affaire comme le Messie ; trois secondes : report. Oui. 2 fois ? 3 ? Déjà je serai loin et ma victime aura lâché prise.

Dans ces coupes drastiques de budget et de moyens, il n'est pas question seulement d'économies mais d'affaiblir et de discréditer un corps qui parfois a su montrer son indépendance, braquant ainsi contre ceux qui le défendent le peuple qui se sent mal défendu. La grève notamment fut parfois, pas toujours, mal perçue, encore des affaires reportées, des trajets, de l'angoisse, "on se moque de nous" etc.. Oui, "on" se moque de nous mais ce ne sont pas les juges, c'est le pouvoir. A ce sujet, les consultations gratuites sont parfois une vaste rigolade, il faut arriver le matin avant l'ouverture, impossible si vous n'avez pas de voiture et résidez à un endroit non desservi à ces heures, le magistrat ne pouvant prendre que 15 cas, attendre dehors au départ (frisquet) sans savoir si "on" va pouvoir passer... pour enfin voir un avocat qui en quelques minutes devra lire, comprendre et trouver la solution, une gageure. Tout ce qu'il se borne à faire en général est de vous indiquer quel tribunal est concerné, ce n'est déjà pas si mal et où aller chercher les documents à remplir voire, si le greffier vous les a fournis, comment. Malheur à vous si vous ne vous exprimez pas de manière claire et rapide, si vous ne pigez pas au quart de tour son langage parfois abscons.. et s'il n'est pas vif d'esprit ou sort de bringue. Il faut savoir par exemple qu’une requête "sous la forme" de référé n'est pas du tout du tout pareil que "en" référé etc... L’auriez-vous deviné ?

Les magistrats étant toujours présentés au public comme rocs inamovibles d’un "corps" ultra favorisé, comme le furent autrefois les profs, le suicide de ce jeune juge aura eu le mérite de mettre en lumière ce dont on se doutait mais ne mesurait pas : lorsque des couacs annoncés surviennent, c’est ceux-là même qui leur ont savonné la planche, avec ici sa hiérarchie faisant chorus, qui les taxent de laxisme, d’incompétence ; entre marteau et table, agonis et jetés aux lions s'ils faillissent. Dépression, médicaments qui parfois aggravent plus qu’ils ne résolvent. Une minute de silence. HL