jeudi 25 août 2011

Dans un mois dans un an, comment souffriront nous.. ?

Des victimes du "médiator" exaspérées par la lenteur de la justice (pour des malades, entre 5 et 10 ans.. qu'ils n'ont peut-être plus devant eux ! sonnent comme un non-lieu, et de plus les expertises ne sont pas gratuites)... Victimes qui, écœurées par la réaction du labo qui se vante que la campagne n'ait en rien fait baisser ses ventes ...  veulent à présent s'immoler par le feu devant le siège de Sanofi (lien). L'horreur.

mercredi 24 août 2011

La justice américaine, une prospective de marketing. "Je pense qu' "ils" vont penser.. " et je m'aligne pour ne pas décevoir mes électeurs.

SUR LA JUSTICE AMÉRICAINE D'ABORD ACTU OBLIGE !


La justice américaine: le chat qui se mord la queue ou "tiens toi au pinceau, j'enlève l'échelle." (A propos de l'article de Jean de Valon, "une suspecte innocence", au sujet de DSK "blanchi" comme on l'écrit un peu hâtivement (au pénal mais non au civil.)

Il était bon de faire cette mise au point. Il n'y a rien de glorieux dans ce "jugement" ou plutôt ce refus d'aller au procès qui aurait dû juger l'affaire DSK/Nafi, et de la part de Cyrus Vance, et par ricochet pour les présumés coupables et victimes. Un "jugement" en pochoir bâtard qui ne dit rien et nous laisse sur notre faim. Le viol est reconnu par les rapports médicaux (mais bon..) seulement voilà! Cyrus Vance n'est pas certain.. qu'il le sera à l'unanimité d'un jury... Autrement dit, ça c'est original, il ne décide pas en fonction de sa propre raison et sa conviction.. ni même de celle qu'il présume des 12 personnes unanimes d'un jury... mais en fonction de la capacité de la plaignante de les persuader ! De sa "crédibilité" dit-il, ce qui veut dire ô Dieux tant de choses! par exemple sa rhétorique, sa manière de s'exprimer, son talent pour persuader -ou celui de son avocat-, la sympathie qu'elle inspire, son allure physique, (ça en fait partie), son passé, son entourage, ses soutiens amicaux, ses réseaux etc.. [En ce sens la victime idéale serait une jeune femme blanche américaine, jolie, discrète, de milieu petit bourgeois impec socialement, s'exprimant de manière aisée et modérée, mettons institutrice, mère de deux enfants bien élevés et épouse fidèle d'un cadre moyen ou supérieur clean et sportif.] Ce n'est pas de la justice mais de la prospective de marketing : le public va-t-il acheter ? Si non, poubelle; si oui, bel emballage et pub idoine. C'est exactement l'opposé de la notion de justice, qui est une réflexion et appréciation minutieuse de faits, d'allégations hors de toute influence "polluante" de "consensus" qui paralyse la raison, afin de restituer autant que faire se peut l'équité, par la dignité restaurée de la victime reconnue comme telle (et partant, victime, elle ne l'est plus!*) La question ne devrait pas être "est-ce que Nafi Diallo saura convaincre qu'elle a été violée" mais a-t-elle été violée? Le proc suppute de ce que pensera Mr toutlemonde.. or Mr toutlemonde est un concept vide, de plus, parasitant la réflexion (même s'il se peut en effet que certains auront plus tendance à s'identifier à un "presque-comme-nous" qu'à une immigrée analphabète.)

Le système français est, sur la forme, meilleur (mais pour ces affaires, trop tolérant sur le fond) : le juge cherche le vrai (en principe) en pesant à charge et à décharge, le plus objectivement possible, sans souci de ce que va en penser le buraliste, le proviseur du lycée, le patron de bar ou la ménagère de cinquante ans.
Donc, aux USA, pour un proc voici le scénar : si vous supposez que le jury pensera que.. qu'il sera influençable (même à rebours de la "vérité" ou de ce que vous pensez vrai, voire de ce que disent les rapports d'expert).. par exemple en évaluant la pugnacité respective des avocats de l'un et de l'autre, et bien c'est simple, alignez vous sur le présumé vainqueur (et en le cas, laissez tomber)... La justice censée rétablir une balance qui penche d'un côté (le dol subi) et charger le plateau le plus haut pour rééquilibrer, ici, fait l'inverse, surchargeant le plateau déjà abaissé. Du côté du plus fort.

Le proc ne juge pas du fond d'une affaire mais DE CE QUE D'AUTRES VONT EN JUGER.. C'est le règne d'un consensus (de plus, un consensus supposé), le règne par définition de la non pensée car au bout du compte, si tout le monde s'aligne de ce qu'on suppose que pensera tout le monde.. qui de même s'alignent sur ce qu'ils pensent que tout le monde etc. il n'y a plus de réflexion. La pensée critique perso et féconde est vidée de tout sens... Cela ressemble un peu aux élèves à l'oral du bac qui se renseignent naïvement sur le prof de philo (ses idées, sa manière d'être, sa longanimité et même ses dadas!) pour pouvoir lui servir à l'interrogation CE QU'IL SUPPOSE QUE CELUI-CI VEUT ENTENDRE, ce qu'il suppose que celui-ci "pense". Ca s'appelle flagornerie, malhonnêteté intellectuelle, sophistique, opportunisme ou démagogie. En tout cas ce n'est ni de la justice ni de la philosophie (qui en est le sous-bassement).

Donc celui qui aura su le mieux naviguer et persuader (et non convaincre) gagnera à tous coups. Or, nous ne sommes pas "égaux" dans la vie et devant la justice.. dont le rôle est en principe justement de remettre la balance à l'horizontale. Pas égaux, non, dans la réalité : il y a des riches, des beaux, des moins beaux, des brillants, des naïfs, des solides, des malades, des génies de la sophistique, du logos, des instruits, des candides et surtout le hasard qui nous a fait naître et vivre dans tel ou tel lieu, notre passé qui nous détermine (pas totalement certes.) Donc une plaignante issue des classes défavorisées (et même de la guerre en le cas) ou moins charismatique, moins attractive, moins "proche" de "nous" aussi culturellement, moins compréhensible, bref, à laquelle on aura peut-être du mal à s'identifier.. aura perdu ses chances devant un proc qui va la renvoyer dans les cordes et lui refuser le procès qu'elle implore.. 

LE PAUVRE EST PAR DÉFINITION TRANSPARENT

Et en effet, elle aura parfois plus à se "reprocher" dans son histoire perso (ou du moins ce sera plus visible, même si en fait c'est minime) qu'un accusé hight classes, probable Président en le cas (!) qui semblera donc susceptible de faire meilleure figure devant un jury, même si ce qu'il aurait à se "reprocher" est du lourd.. (mais aussi ce sera moins visible.) Le pauvre est par définition transparent, soumis aux regards critiques de tous, de la société, de ses confrères de misère, des administrations, des voisins ; on sait à peu près tout de lui, s'il s'énerve, s'il s'entend bien avec sa femme, sa famille, s'il peine à se lever le matin, s'il manque le boulot ou se trouve au chômage, de quoi il vit, quelle voiture il possède, s'il a des contraventions impayées, des dettes au fisc, combien de douches il prend (ou ne prend pas), s'il a tendance à boire un petit -ou un grand- coup le samedi, comment il élève ses enfants, si ceux-ci réussissent à l'école, font des bêtises etc : dans des HLM, il ne peut rien cacher de sa vie. Tandis que l'intimité est au contraire garantie au riche : on ne sait rien de ce qui se passe dans un appart de la 5 ème avenue ou dans une maison individuelle entourée d'un parc et de hautes grilles. Et si par hasard quelque chose de pas très net filtrait, ça arrive tout de même! il lui sera aisé de faire taire les bruits : menaces, argent etc. et c'est lui qu'on croira ou feindra de croire.

En effet, pour survivre, en temps de guerre, on peut mentir : rappelons que Nafi a naïvement "menti" sur la manière dont elle a été violée dans son pays mais pas sur le viol lui-même (ce n'était pas un viol collectif mais individuel) et que si elle pleure, il est clair qu'elle pleure à bon escient.. oui, on peut "mentir" pour survivre, et les leçons de morale données par ceux qui vivent et ont toujours vécu en période de paix à ceux qui ont subi de tels crimes sont inappropriées. En temps de guerre, on peut bien pire encore que mentir ! (lien)

* LE PARADOXE DE LA SITUATION DE VICTIME EST QUE CELLE-CI CESSE DE L’ÊTRE DES QU'ELLE EST RECONNUE COMME TELLE PAR LA SOCIÉTÉ. COMME SI LE GROUPE SOCIAL LUI AVAIT RESTITUE SA DIGNITÉ EN ABSORBANT SON DOL, EN PRENANT SUR LUI,  ET A SA PLACE, SON HUMILIATION, (EN CAS DE VIOL NOTAMMENT.) SI LES VICTIMES SE BATTENT TANT POUR ÊTRE RECONNUES (LA SITUATION N'AYANT A PRIORI RIEN D'ENVIABLE), C'EST JUSTEMENT POUR NE PLUS L’ÊTRE ET POUVOIR ENFIN VIVRE AUTREMENT, COMME TOUT LE MONDE.